LE CHALET OÙ L’ON BRISE LA GLACE (2) – MAISON DE THÉ, SHANGHAI

La jeune lle nous parle d’un Laoshan Cha, un thé de montagne près de Qingdao dans le Shandong. Son parfum est comme « l’eau du riz juste avant que les grains ne commencent à s’assouplir ». C’est le thé cultivé le plus au nord de la Chine.

Je lui demande quels thés elle préfère. Cela dépend du jour, de la saison, de son humeur. Quand il pleut, que la pression est basse, nous dit-elle, malgré beaucoup d’attention portée à la durée des infusions et à la température de l’eau, le thé n’exprimera pas toute son ampleur. Alors, elle prépare du pu’er cuit¹.

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Une attitude différente de beaucoup de chinois amateurs de thé. Ceux-ci, que le thé a accompagné durant l’ensemble de leur vie, n’en boivent souvent qu’un seul. J’ai rencontré à Shenzhen la famille étendue d’une amie cantonaise, une région où le thé est, plus qu’ailleurs s’il est possible, central dans la culture. Le père, âgé, entouré comme un patriarche des enfants, nièces et cousins, mais en retrait et silencieux, ne boit qu’un seul thé du matin au soir. Un Dancong² aux infusions marquées, toujours du même producteur, dont il s’approvisionne par un ami.

Bien que sensible à la culture traditionnelle depuis longtemps, elle n’avait jamais vraiment prêté attention au thé. C’est par hasard qu’elle vient à Shanghai, après des études de photographie à Pékin. Lorsqu’elle découvre la voie du thé, dans ce même lieu, elle se sent tout naturellement attirée, souhaite apprendre. Loin d’apparaître comme une élève qui travaille ici depuis moins d’un an, sa présence apaisée donne vie au lieu, au milieu des thés et des plantes, dans la petite maison de thé de la rue Shaoxing³.

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Dans la minuscule cour à l’arrière, une myriade de plantes de toutes tailles témoigne d’une volonté d’apprivoiser le végétal sans le contraindre. Cette oasis urbaine pourrait être le mini jardin d’un temple zen. Des vieux immeubles qui nous surplombent et que l’on oublie derrière les branches, nous parviennent, en n d’après-midi, les seuls bruits des cuisines en balcon. Et juste au-dessus de nos têtes, entre les feuillages des bambous, les chats passent d’un toit à l’autre.

Yann Shanghai, 2017

Notes et liens
¹ Pu’er cuit. Le Pu’er est une famille de thé à part entière, en provenance du sud du Yunnan. Très prisé des chinois, il est laissé vieillir plusieurs années, souvent compressé en galettes. Le temps l’assagit et le défait de son caractère vert pour lui donner une coloration rouge sombre en développant les notes si caractéristiques des pu’er. Chez les pu’er cuits, ce lent processus de maturation est reproduit en introduisant une fermentation des feuilles après la récolte.
² Les thés wulong Dancong de la province de Canton (comme les Mi Lan Xiang et Mi Hua Xiang).
³ Maison de thé Qiaobing Shanfang, rue Shaoxing, Shanghai [敲冰山房 绍兴路 上海].

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